Lorsqu’un jeu de rôles propose un univers riche et fouillé, au-delà d’un simple décor, une objection récurrente, c’est qu’y jouer demande beaucoup (trop) d’investissement. C’est particulièrement le cas pour Runequest avec le monde de Glorantha, né il y a plus de 40 ans de l’imagination de son auteur, Greg Stafford, et développé continuellement depuis. De là à se dire que pour se lancer, il faut avoir au moins un doctorat en gloranthologie, il n’y a qu’un pas. Au fil de cette série, j’ai l’ambition de montrer comment une meneuse de jeu peut se lancer dans une campagne gloranthienne en débutant à une échelle très modeste et en étoffant l’univers à mesure que son aisance s’accroît.
Au commencement…
Après 9 ans de pause, alors que l’envie de reprendre le jeu me titillait depuis quelques temps et que la cause de cette interruption, du haut de ses 9 ans, rêvait de découvrir le jeu de rôles sur table, toutes les conditions étaient réunies pour se lancer en famille dans une nouvelle aventure. La question se posait alors, pleine et entière : à quoi allions-nous jouer ? Il me fallait un jeu abordable et aux thématiques appropriées pour un enfant, un système pas trop complexes et, bien évidemment, un jeu qui m’inspire, qui me donne envie. Presque instantanément, un nom me vint aux lèvres : Runequest.
Voilà des années que ma bibliothèque de Runequest (le RQ3, en version française de chez Oriflam) dormait au grenier. Hormis quelques tentatives peu concluantes, je n’avais pas joué à Runequest depuis 1998 et dans Glorantha depuis 2008. Pourtant, l’envie de revenir à ce formidable univers en tant que meneuse de jeu me chatouillait avec insistance. Mes vieux livres ont donc quitté les cartons pour rejoindre les bagages pour des vacances que j’espérais ludiques. C’est comme ça que j’ai sauté à l’eau.
Premiers pas : planter le décor.
Je commençais donc avec deux joueurs, l’un rôliste expérimenté et bon connaisseur de Glorantha, mais terriblement rouillé, car en pause depuis aussi longtemps que moi et pour les mêmes raisons, et l’autre âgé de 9 ans. Il me fallait poser les premières pierres de mon décor. Sans idée précise de ce que je voulais faire et loin d’avoir l’ambition de me lancer dans une campagne, je cherchai un terrain où je me sentirais à l’aise et qui permettrait à un parfait débutant de se situer sans peine. Le lieu et l’époque me vinrent assez naturellement : mon histoire se situerait dans le Far Place (Lieu Lointain, dans la dernière VF), une région que je connaissais pour l’avoir arpentée en tant que joueuse dans une campagne quelques 20 ans plus tôt, et dans les environs de l’année 1620, c’est-à-dire en pleine occupation du Royaume de Sartar par l’Empire Lunar. De mon point de vue de narratrice, la conjonction d’une zone frontalière et d’une période d’occupation militaire devaient stimuler mon imagination en m’offrant une large palette d’histoires à raconter. Je n’imaginais pas encore à quel point…

Le territoire du Clan du Taureau Bleu
Vint le moment de créer des personnages. On se mit d’accord sur deux guerriers sartarites, orlanthis. Ils seraient frères. Le père de famille était mort en défendant héroïquement Boldhome en 1602 et ses deux fils avaient été élevés par leur mère, aidée par ses deux beaux-frères, les jumeaux Marog et Varog, l’un orlanthi et l’autre humakti. Ainsi étaient nés les frères Sarnosson. À moi maintenant de leur imaginer un environnement.
Le village de Vivepierre sortit alors de terre : une petite communauté de quelques familles sous la direction d’un thane et qui devait son nom aux innombrables cailloux inlassablement sortis des champs par des générations d’ancêtres et rassemblés sous formes de murets autour des parcelles cultivées. Installés non loin de la Grande Route (l’axe qui relie le nord de la Passe du Dragon au sud vers Boldhome et à l’est vers Prax), les vivepierrains vivaient dans une relative autonomie, relativement loin du chef-lieu du Clan du Taureau Bleu.
À ce stade, je n’avais pas besoin de beaucoup plus pour nous lancer dans notre première aventure.
RuneQuest, HeroQuest et Glorantha sont des marques déposées de Moon Design Publications et Chaosium, et de Studio Deadcrows pour la version française.